L’encre au Moyen Âge

Comment fait-on de l’encre au Moyen Âge ?

À l’époque médiévale, point de stylo plume à cartouche ni de stylo bille et encore moins de feutre ! Alors, comment écrit-on dans les manuscrits ? Comment est produite cette encre indélébile qui a traversé les siècles ? Une chose est sûre : on n’utilise pas encore d’encre de Chine…

Bible de La Sauve-Majeure, 12e siècle, Bordeaux, Bibliothèque Municipale

On peut faire de l’encre à partir du carbone (bois calciné) mais en Occident à partir du XIIe siècle, on préfère les encres ferro-galliques ou métallo-galliques. Ce sont des encres plus résistantes, qui associent 3 éléments principaux :

  • Noix de galle
  • Sel métallique
  • Liant

 

Qu’est-ce que la noix de galle ? En tout cas, ce n’est pas le fruit du noyer !

Quand un petit insecte, le cynips, pique le chêne pour pondre, l’arbre réagit en produisant cette boule de la taille d’une balle de ping-pong. Un peu comme lorsqu’un moustique nous pique et que la peau gonfle !

Les larves de cynips se forment à l’intérieur et la sève de l’arbre les entoure petit à petit.

Pour faire de l’encre, il faut se dépêcher ! La noix de galle doit être récoltée avant l’été, quand les larves sont encore à l’intérieur. Si elles en sortent, la noix aura moins de tanin, la substance végétale qui permet de noircir l’encre.

La plus réputée et qu’on importe au Moyen Âge : la noix de galle d’Alep, mais on en trouve aussi dans les forêts d’Europe.

Comment faire ?

Une fois bien sèches, il faut les écraser et verser la poudre obtenue dans beaucoup d’eau que l’on fait bouillir.

Quand le mélange est réduit de moitié, y ajouter un liant :  la gomme arabique (sève) et bien écraser. Laisser mijoter sur le feu pour faire encore réduire.

Source de l’image : la recette

Hors feu, ajouter le sel métallique (sulfate de plomb, de cuivre ou de fer qu’on appelle aussi vitriol) et parfois du vin pour le côté tannique. Le sel métallique entre en réaction avec l’extrait végétal et noircit. Voilà notre encre noire.

Sulfate de fer

 = 

Image issue de la vidéo Making Manuscripts du Getty Museum

 

 

Des recettes du Moyen Âge

Inc |austum| latinum; accipe vas de terra quod capiat VIII l. |libras| aque; postea mediam libram galette et tere bene ; postea bulli usque ad medietatem, tunc accipe tres untias gummi arabici et tere bene et colato illo quod est in oll |a| apponatur gumma, tunc bulliat ad medietatem. Postea aufer ab igne et tunc accipe 4 uncias vitreoli et l. |libram| vini calidi aliquantulum et debes miscere vinum et vitreolum in alio vase bene, tunc paulatim apponatur ad inc |austum| miscendo senper bene; ita stet per duos dies et quolibet die moveatur quarter cum baculo postea.

British Library, London, Harley 3915, Recueil de recettes d’encres et de pigments, 2nde moitié du XIIe siècle

 

POUR FAIRE TROIS PINTES D’ENCRE, prenez des galles et de gomme de chascun deux onces, couperose trois onces; et soient les galles casse?es et mises tremper trois jours, puis mises boulir en trois quartes d’eaue de pluye ou de mare coye. Et quant ils auront assez boulu et tant que l’eau sera esboulie pre?s de la moitie?, c’est assavoir qu’il n’y ait mais que trois pintes, lors le convient oster du feu, et mettre la couperose et gomme, et remuer tant qu’il soit froit, et lors mettre en lieu froit et moite. Et nota que quant elle passe trois sepmaines, elle empire.

Le Menagier de Paris. Traite? de morale et d’e?conomie domestique compose? vers 1393 par un bourgeois parisien, Tome Second, Paris, 1846, p. 265.

 

On peut également réaliser des encres à partir d’épines selon un procédé assez proche.

Recettes adaptées : 

Première recette :

Ingrédients :

  • 30g de noix de galle concassées
  • 15g de gomme arabique
  • 15g de sulfate de fer
  • eau
  • essence de lavande (facultatif)

Faire bouillir les noix de galle concassées dans 500g ou un demi-litre d’eau, de manière à avoir 450g de décoction; faites dissoudre la gomme ; quand le tout est froid et passé, ajouter : sulfate de fer cristallisé préalablement dissous dans 30g d’eau. On peut ajouter quelques gouttes d’essence de lavande.

L’encre ainsi produite se conserver plusieurs années, mais elle a tendance à faire du dépôt.

Deuxième recette (TESTÉE) : Lezarbres 

 

Troisième recette : L’atelier de Mathilde et Goscelin

Sources 

Cora Millet-Robinet, Maison rustique des dames, Librairie agricole de la maison rustique, Paris, 1845, p. 312

Marc Niederhauser, Alchimie de l’enluminure : 80 recettes éprouvées, Eyrolles, 2011

Une ressource à utiliser, l’exposition virtuelle de la BnF sur les écritures


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Commentaires

3 réponses à “L’encre au Moyen Âge”

  1. Avatar de Ludivine
    Ludivine

    Bonjour

    Merci beaucoup. Très intéressant. Ça ne va pas être simple de trouver ces noix. Je me promène tous les jours dans la nature et je n’en ai jamais vu…à moins de grimper haut dans les arbres peut-être ?? Lol
    Merci ?

    1. Avatar de CLEM Patrimoine

      Bonjour et merci pour votre commentaire ! Pas besoin de jouer les équilibristes, on peut trouver les noix de galle assez facilement sur les branches basses des chênes, et elles sont même encore plus facilement repérables après la chute des feuilles. Bonne recherche 😉

    2. Avatar de Kévin
      Kévin

      Bonjour,
      Vous pouvez également en trouver facilement chez un droguiste.

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